[Retour en Ozuie.] C'est peut-être le bon moment pour m'en aller, je me dis. C'est juste un tout petit peu déchirant. Je repartirai avec l'image d'un train qui passe, d'une fille qui court dans la même direction que le train sur la plage. Ce n'est pas si terrible. Le bruit du train, le bruit des vagues. Et le vent qui soulève brusquement les cheveux, quand le train passe, la brise qui les soulève plus légèrement, continûment, au bord de l'eau. Le train passe puis disparaît. La fille court sur la plage puis disparaît. Mais il fait bon. C'est comme ça, dans été précoce. C'est juste un tout petit peu déchirant. A un moment, se succèdent deux travellings très courts, sans rien dedans, vides. On cherche le sens. Il n'y en a peut-être pas. Ou bien : Regardez, ça ne sert à rien, ça ne veut rien dire du tout, c'est un effet de style, un truc pour réveiller le spectateur qui s'endort. Il se fout de notre gueule, peut-être seulement, gentiment. Il y en a aussi quelques autres, qui font un drôle d'effet. Mais les deux qui se succèdent, vides, sont vraiment très bizarres. On s'en souvient longtemps. Même s'ils ne contiennent rien. Bientôt, il n'y en aura plus du tout, des travellings. Pour quoi faire? Pour quoi dire? Pour aller où? On s'en fout. Il fait bon. L'histoire, c'est toujours la même, finalement. Sauf que parfois, elle est un peu plus douce, juste un tout petit peu déchirante. C'est une question de saison, peut-être seulement. Il fait bon. Les insectes stridulent. Les oiseaux chantent ce qu'ils ont à chanter. Ça adoucit la peine, quand elle survient. On a du temps encore avant l'automne. C'est tout. En Ozuie, quand on y fait attention, il y a quatre saisons. Il y a printemps tardif, été précoce, printemps précoce, puis fin d'automne. Et l'hiver alors? on se demande. L'hiver, c'est la mort, c'est rien du tout, on n'a donc rien à en dire ni rien à en montrer. Et là, on est en été et même plutôt à la fin du printemps, puisque l'été est précoce. Ce n'est pas encore la canicule, même si, à la fin, quand même, on la sent un petit peu, comme légèrement assommés. Mais presque tout du long on est bien. Parce qu'il fait bon. Il y a même parfois pas mal d'insouciance. On rigole, aussi. Faire caca! répond le gamin quand on lui demande où il va. C'est le bon moment pour s'en aller. Je resterais bien encore un peu, mais quelque chose me dit que j'aurai plus de mal à repartir si je tarde trop. Là, c'est juste un tout petit peu déchirant. Parce qu'il fait bon. Parce qu'on est bien, mine de rien, même si à la fin on est un petit peu assommés. Ce serait dommage d'attendre trop et de repartir avec des images bien plus sombres. Et où vais-je aller maintenant?... Faire caca!
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