Tu croyais peut-être que je ne reviendrais plus? Que c'était fini?... Mais je reviens toujours. Fluctuant comme la mer, je vais et viens sans cesse... Et rien jamais n'est fini. Comment ce qui n'a jamais vraiment commencé pourrait alors finir?... Il est vrai cependant que je ne suis plus tout à fait le même homme... Je suis retourné voir ma mère. Ravie de me voir plus fumant du tout mais vapotant abondamment comme la machine à Papin. J'ai troqué mon paquet de tabac contre toutes sortes de fioles nicotinées, bien plus drogué qu'avant, flairant en permanence mes drogues sur mon embout, mes doigts. Ma mère m'a alors accueilli tel le fils prodigue revenu de 35 ans de tabagie et me voilà envoyant d'énormes nuages de vapeurs de havane dans la cuisine, dans le salon, moi qui jadis avais à peine le droit de fumeroller coupablement mon tabac de pauvre, été comme hiver sur le balcon. On va rendre visite à ma sœur. Me voilà vautré sur son canapé, complètement dans les vapes à m'envoyer voluptueusement ma nicotine. Comme c'est bon... Il m'aura fallu un peu plus de deux semaines pour décréter définitivement la vapeur supérieure à la fumée... Encore plus drogué qu'avant... Mais femme actuelle dit que c'est bien... Parfois stupéfait, voire bouleversé, j'ai retrouvé ce que je ne soupçonnais pas avoir perdu : goût, odorat, souffle, sommeil... À un moment, sur le canapé, ma sœur pose longuement sa main sur la mienne. Je la regarde. Elle a vieilli, sa main. La mienne aussi. On a vieilli... Le lendemain, dans la cave de ma mère, je trouve une vieille boîte de diapos : Été 69. C'était donc il y a 45 ans... 45 ans... Je ne les connaissais pas, ces photos... Ça m'émeut... Entre ma mère et ma sœur... Cet instant a eu lieu...
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