Et puis l'envie revient. Ou le besoin? Comme un besoin? Faire son besoin? Besoin... Besoin... Quel mot étrange... be... zoin... L'envie?... Ou le besoin?... Tout l'après-midi, à ne pas savoir trancher... Le besoin serait-il seulement une envie qu'on ne pourrait plus contenir?... Faire son besoin : évacuer, se soulager... Le plaisir est dans l'écoulement... L'apaisement, au moins... Et après, il n'y a plus rien, je suis vidé, je suis alors vide, le monde alors disparaît, comme si je m'étais vidé du monde, voilà, et donc moi aussi je disparais, peut-être... mais je ne sais pas... je n'arrive pas à me décider... si je disparais, ou non, quand le monde disparaît, si j'en suis seulement un occupant, un élément, minuscule, négligeable, ou l'inconscient démiurge... Il s'efface et moi donc aussi je m'efface, peut-être, mais peut-être pas... En m'écoulant... Ce besoin de s'écouler... Ce vieux rêve de n'être qu'écoulement... Mais pas vraiment un rêve, plutôt un fantasme conscient, comme de faire son lit dans le temps... Le temps... Faire son lit dedans et alors s'y coucher... et alors s'écouler... Je prends toujours le même train, toujours la même ligne et je ne sais toujours pas où je vais, c'est même peut-être pire que ça : je le sais de moins en moins... Mais ça ne m'angoisse pas. Au contraire, ça m'apaise. Parce que je m'écoule... Parce que je ne suis bien que dans l'écoulement... Je dis ça et à la fois j'en doute... Car il y a quelque chose d'un peu morne, à la fois, à se sentir toujours dans le même train et à finalement très bien savoir où il va : nulle part... Mais un nulle-part qui n'a peut-être pas toujours été un nulle-part? je m'interroge... Je ne sais plus... Je n'ai peut-être même jamais su... Ou alors si j'ai su, j'ai oublié, c'était un savoir momentané... Le buraliste m'explique qu'ils viennent de sortir une nouvelle cigarette à bout filtre rotatif, à deux positions, normale ou light... La même cigarette, normale ou light... Bien... Ils sont forts, ces Américains... Que le fumeur soit libre de fumer une cigarette normale ou alors une cigarette light et ce avec la même cigarette, à la fois normale et light... Ils devraient faire la même chose avec les trains, je me suis dit plus tard, me disant ensuite que ça ne voulait rien dire, que je devenais idiot, que le monde me rendait idiot... Mais pourtant, ça continuait de me trotter dans la tête, faire la même chose avec les trains qu'avec les cigarettes à bout filtre rotatif... Oui... Et alors voyager normalement, ou alors light... Deux façons de s'écouler vers nulle part, l'une normale, l'autre light...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire