Tandis que Slow Joe s'épuise lentement à tenter d'ouvrir son parapluie automatique, je m'interroge quant à moi vainement sur le sens de ma vie, sur le sens de cette journée à l'image de ma vie, sur le sens de tout ça, de Slow Joe, des parapluies automatiques qui sont censés vous simplifier la vie mais finalement ne vous apportent que des tracas, des petits tracas, plus d'autres petits tracas, puis encore d'autres petits tracas qui s'agglomèrent ça finit par faire une vie, une petite vie ou une grande vie c'est selon, une petite grande vie ou une grande petite vie, je me dis aussi que bientôt je ne verrai plus Slow Joe, qu'il n'y aura donc plus de Slow Joe, non pas que Slow Joe va déménager ou disparaître, il va poursuivre sa routine de Slow Joe, que je commence à bien connaître, il est habitué d'une gargote Place Sathonay qui doit lui rappeler les bouibouis de Bombay et chaque matin il donne la main pour installer les chaises, il va donc continuer et c'est moi qui vais disparaître, au moins un certain temps, il n'y aura plus de cinéma fantôme, plus donc non plus de projectionniste ou de caissier fantôme, de guetteur, car il y a un nouveau patron, du genre très dynamique, très médiatique, un genre de Roi Soleil qui aurait déclaré : Le Cinéma, à Lyon, c'est Moi!... et alors ils vont ravaler la façade, au moins changer l'ampoule de l'enseigne grillée depuis au moins quinze ans, tout remettre aux normes comme on dit, ça prendra donc un certain temps et rien ne dit que je reviendrai plus tard à cette même place, avec ce même état d'esprit, cette tranquillité mine de rien dans le naufrage, mon naufrage dans ce naufrage, car ce sera sans doute plus difficile de me ravaler la mienne de façade et de me remettre aux normes et tout ça qui devrait me rassurer, la remise à flot d'un cinéma qui n'en finissait plus de couler, finalement me désole, tant je me sentais à ma place dans cette interminable agonie.
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