Non, je ne suis pas déçu. Je ne m'attendais à rien. Je n'espérais rien. Mon profil ne convenait pas. On a la gueule qu'on a. Quel profil aurais-je dû avoir? Pas le mien en tout cas. Je me souviens comme j'avais peur, tout petit, à l'instant de m'endormir. Je tombais. Il n'y avait rien. Je tombais dans ce rien. L'effroi de disparaître, de mourir à chaque fois. C'était l'époque où il n'y avait pas encore de rêves. Puis il y en a eu. Des rêves qui faisaient peur, au début. Des bêtes des abysses, infernales, qui me pourchassaient. Je sentais leur haleine malfaisante sur mes mollets. Je me réveillais en hurlant. Il y avait des bêtes sous mon lit, des bêtes au plafond, partout des bêtes. C'était l'époque des bêtes après celle du néant. Puis, petit à petit, je n'ai plus eu peur, ni des bêtes ni du néant. Je me suis même mis à apprécier beaucoup les bêtes et le néant. Je tombe. Je me fiche de savoir où je tombe. S'il y a quelque chose ou alors rien. On verra bien. Ou pas. Je ne suis pas déçu car j'ai du mal à prendre tout ça au sérieux. La vie, ce n'est pas sérieux, que l'on dorme ou que l'on soit éveillé. Déçu, je l'ai été, parfois, dans ma vie, et même beaucoup, et même longtemps. Mais c'est comme la peur des bêtes, la nuit, la déception, ça finit par passer. Ça n'aura été qu'un stade de mon évolution, le temps de la déception.
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