Hideko Takamine est sublime, dans quand une femme monte l'escalier, de Mikio Naruse. Mizoguchi avait Kinuyo Tanaka. Ozu avait Setsuko Hara. Kurosawa, lui, avait Toshiro Mifune, c'était plus masculin, jusqu'à ce qu'ils rompent avec fracas. Naruse, peut-être moins possessif, partageait Hideko Takamine avec Keisuke Kinoshita. (La rivière Fuefuki, comme c'était beau, expérimental et classique à la fois... Et vingt-quatre prunelles alors... maîtresse petit caillou... comme j'ai pleuré, à la fin...) On l'a vue aussi chez Ozu. (Ah... les sœurs Munakata...) En fait, ils la voulaient tous, la belle Hideko... Dans quand une femme monte l'escalier, ils la veulent tous, aussi... Même si elle commence à vieillir, même si elle vomit du sang à cause de son ulcère... Son ulcère?... A cause de l'escalier, devoir le monter, tous les jours, quand on a horreur de ça... Naruse lui disait, à Hideko, avant de tourner : Vous n'êtes pas obligée de tout dire votre texte, si vous préférez l'exprimer autrement... Ils s'entendaient bien... Pas besoin de parler, souvent, on se comprend à demi-mot et même à pas de mot du tout... Le cinéma, ce n'est pas du blabla... Un visage, ce n'est pas qu'une bouche, c'est même souvent un paysage... Et celui d'Hideko alors, vous l'avez vu une fois, vous ne pouvez plus vous en détacher... Vous aussi, vous la voulez, Hideko!... Les paroles qui sortent de sa bouche sont plutôt une sorte de musique, un coup d'œil sur les sous-titres en anglais que vous comprenez à peu près vous apprennent que vous n'avez pas raté grand chose... Sa voix est une émanation de son corps, voilà, comme son parfum, le sens de ses paroles est finalement secondaire. (Le son détermine la phrase, disait Stan Getz...) C'est beau, le japonais, très expressif, musical, on saisit beaucoup de choses, de nuances, sans connaître la langue... Naruse est le dernier des quatre. Avant, ils n'étaient que trois, Ozu, Mizoguchi, Kurosawa, les trois piliers du cinéma classique japonais. Puis, sur le tard, à titre posthume, on a inclus Naruse. On n'arrivait pas à le situer, à le résumer, on ne le trouvait pas assez... japonais, zen... net... je ne sais pas quoi... On n'arrivait pas à l'adorer comme les trois autres... Il nous glissait entre les doigts, en somme... Il n'y a pas de héros, pas véritablement non plus de salauds... Tout le monde est sous la même lumière, disparaît dans la même obscurité... Les hommes, même si parfois ils sont veules comme chez Mizoguchi, ne sont pas que ça... Tout le monde a ses faiblesses... La femme n'a pas besoin d'être idéalisée pour être magnifique... (Même si, pour Naruse, La Femme, c'était Hideko Takamine...) [ Prononcer les "e" "é" et les "u" "ou"...]
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