samedi 28 novembre 2009

Quel plaisir de découvrir un film d'Otto Preminger que l'on ne connaissait pas. On me dira qu'on ne peut découvrir quelque chose que l'on connaît déjà et je rétorquerai que l'on croit parfois connaître une chose, ou une personne, avant de vraiment, à un instant donné, faire l'expérience de sa connaissance, la découvrir, comme si elle nous avait été jusque là voilée, cachée. Mais, en ce qui concerne Daisy Kenyon, d'Otto Preminger, je ne l'avais jamais vu avant aujourd'hui et n'en avais même jamais entendu parler. C'est un drôle de film, qui laisse un drôle de goût. A la fin, j'avais un grand sourire et les larmes aux yeux, tellement je m'étais identifié à Henry Fonda. On croit tout du long que c'est un film noir. L'ambiance est là. On attend. On sent la part d'ombre qui veut s'épanouir, qui n'attend que le déclic pour emporter et engloutir les personnages. On en a même terriblement envie. C'est comme un désir contenu. Au bout d'un moment, une sorte de frustration s'installe. On n'est pas où on devrait être, on ne ressent pas ce qu'on devrait ressentir. Tout ce qui semblait menaçant, noir, et qui est tenu jusqu'à la fin (le téléphone qui sonne interminablement, même hors-champ... Sergio Leone avait-il vu ce film avant de faire il était une fois en Amérique?...)... tout s'étiole sans vraiment disparaître, revenant comme des volutes de fumée... C'est un faux film noir... Ou alors c'est un film noir perverti dans l'œuf... La grâce lunaire et faussement candide d'Henry fonda contrebalance parfaitement la virilité impulsive de Dana Andrews, acteur prémingerien emblématique tout autant trouble ici que dans le magnifique where the sidewalk ends... Il y a comme un virus injecté dans la mécanique prémingerienne... Il a lu Sun Tzu, c'est évident, l'amour est un art au même titre que la guerre... Et la femme dans tout ça?... Elle n'est pas fatale, elle est souveraine... On est très loin des stéréotypes habituels... Chaque personnage est d'une grande complexité psychologique... Le film continue, longtemps après la fin, comme si le téléphone, que personne n'a décroché, continuait de sonner...

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