jeudi 26 avril 2012

Ah... Mankiewicz... Ah... Gene Tierney... Rex Harrison... Ah... the ghost and Mrs Muir... — C'est tout ce que t'as à dire? Ah? T'as pas l'impression qu'c'est un peu mince? Que tu t'fous un peu d'la gueule du monde? Imagine s'il y a des gens qui lisent... Ce qu'ils vont penser de toi, avec tes ah... et puis tes histoires de salades... tes salades... quand même... — J'dis c'que j'veux... Et s'il y a des gens, il y a des gens, je ne suis pas allé les chercher et ne les retiens pas, ils pensent ce qu'ils veulent, ne sont pas forcés de venir et encore moins de lire, ils n'ont même pas payé en plus il manquerait plus qu'ils viennent se plaindre... Chuis pas critique de cinéma, moi, pas non plus historien, ni même rien, et puis j'm'en fous, je ne désire intéresser personne, je passe juste un moment avec moi-même... et moi, quand chuis content, j'fais ah... c'est comme ça... — Bien primaire... — Exactement!... — C'est quand même léger... — Exactement... J'ai tout de même remarqué pour la première fois que dans le film ils prononçaient Miour... et pas Mouir... Pourtant, le i est après le u... — Juste ça?... — Bien sûr que non, mais enfin, quoi? Que c'est beau? Que c'est drôle? Que c'est triste?... Qu'on aimerait tant être le fantôme de la Miour?... Parce qu'il la voit toute nue, et oui... quand même... Nous, on ne voit rien du tout, mais lui, le capitaine, pardon... Sauf qu'il ne peut pas la toucher, la Miour... — On ne peut pas tout avoir... Mais quand même, à la fin, ils partent ensemble... — Oui... mais ils sont morts... — Ça ne nous avance pas tellement tout ça... — On n'a pas besoin d'avancer... On n'est pas bien, là?... Ah... Mankiewicz... Ah Gene Tierney... Et la grosse voix de Rex harrison... dans the ghost and Mrs Muir... putain, ça déchire... — Ça déchire... Ça déchire quoi?... — C'est déchirant... Ça fait pleurer quoi... Ça fait pleurer en souriant... C'est quand même beau, l'amour, même si souvent c'est con... — Beau et con à la fois?... — Mais oui... Elle est veuve, la Miour, sans avoir connu vraiment l'amour... Puis elle tombe amoureuse... mais d'un fantôme... c'est con... La seule grande et belle aventure de sa vie est un rêve... Et lui au début qui ne veut pas qu'on l'emmerde, dans sa maison hantée, qui essaye de la faire fuir, la Miour... Puis il s'attache... Et il la voit toute nue, alors, il lui dit même qu'elle est sacrément bien balancée, la Miour... Elle dort même dans son lit, ça le fait bien rigoler, en même temps ça a du sens, elle dort dans son lit, dans son lit où lui n'est plus, même s'il y est toujours encore... Et il est mort connement, aussi, tout le monde croit qu'il s'est suicidé, ça le met en rogne... Et lui non plus, il n'avait jamais vraiment connu l'amour, même s'il avait eu des filles dans tous les ports... Il lui dicte le roman de sa vie... Puis il s'efface, lui murmure pendant qu'elle dort qu'elle a tout juste rêvé, qu'il n'y avait pas de fantôme et que c'est elle qui l'a écrit, le roman... Pour qu'elle soit heureuse, il disparaît... sois heureuse... même s'il sera toujours là, mais plus du tout comme avant... Il lui a donné sa maison, son œuvre, son amour, à la Miour, pour qu'elle soit heureuse, puis il a disparu, corps et âme, plus même fantôme du tout, juste un tableau au mur de la Miour... Sauf qu'elle n'a pas été heureuse... Enfin si, un petit peu quand même, elle a chéri son rêve, le souvenir de son rêve... Elle a vieilli, la Miour... toute seule dans sa maison chérie, dont elle aimait tellement l'atmosphère et la maison alors aussi la chérissait, la maison qu'il avait lui-même dessinée, imaginée, la douce, tendre, cruelle, mélancolique prison de la Miour... Elle n'a jamais été aigrie en tout cas... C'est beau et con à la fois... et moi ça me fait pleurer... Et puis il y a la mer... — Et puis Georges Sanders, en salaud, qu'est-ce qu'il est bien... et tellement pathétique, dans son genre... — Il est toujours très bien, Georges Sanders, en salaud pathétique... — Et la musique aussi... — Ah... Bernard Herrmann... — Tu vas nous faire tout le générique comme ça?... —Et pourquoi pas?!... — Et tu y crois aux fantômes, toi?... — Évidemment... J'en ai même rencontré une... Tu veux que je te raconte?... — Alors, tu étais tout à la fois le fantôme et la Miour... Je comprends mieux maintenant...

mercredi 25 avril 2012

Pas peu fier de moi, quand, il n'y a pas une heure, faisant mon marché, ayant doublé prestement une jeune femme poussant landau, j'ai glissé sur une feuille de salade, me suis alors envolé et même très haut... Pas la moindre surprise, comme sur le tatami, j'ai atterri sur le bout de l'autre pied et sur une main, mon sac plein de courses dans l'autre, me suis relevé en souriant, le cœur calme, la clope au bec, pas même eu besoin de m'épousseter le bas du pantalon ni de ramasser une pomme qui aurait bondi de mon sac car, dans les airs, j'avais aussi un œil sur mon sac ainsi que sur tout ce qui m'entourait... La fille, derrière, avec le landau, était estomaquée... Moi, tranquille... Dix ans d'aïkido, grosso modo... Tomber, je sais, grosso modo, mon corps a mémorisé, c'est comme marcher... Je dirais même que c'est ce que je préfère, la chute... Il faut s'envoler... Puis comme un chat, retomber sur ses pattes... La chute, c'est une esquive... pas un échec... C'est pour se sauver... La feuille de salade ne m'a pas eu, en tout cas... C'est bien traître, une feuille de salade, je m'en méfierai plus désormais... En rentrant, j'ai eu envie d'aller voir quelques vidéos de Morihiro Saito... C'était peut-être le disciple le plus humble de Ueshiba, un fils de paysan du village qui avait commencé l'aïkido à 18 ans... Toujours dans son ombre, on le voit, sur les photos, il le suivait, toujours à distance respectable, la tête un peu baissée, les mains sur son ventre, il le regardait faire ce qu'il faisait, d'ailleurs je pense qu'à la fin il ne faisait plus que regarder, c'était l'enseignement : Regarde... C'est lui, à la mort de Ueshiba, qui a repris le dojo d'Iwama, le village de Ueshiba et également le sien... Pas le grand dojo de Tokyo, non... le petit d'Iwama... le plus important donc... C'est Saito que je prends le plus de plaisir à regarder, que je comprends le mieux... Un gros, très gros chat... il bouge à peine... Un artiste du sabre aussi, et du bâton... Il vous prenait la tête et l'envoyait à l'autre bout de la pièce, très simplement, en poussant un cri magnifique... En même temps, il savait doser tout ça parfaitement, s'adapter au partenaire au premier coup d'œil, parce qu'au premier coup d'œil tu vois tout, de qui tu as en face de toi, comment il se tient, comment il bouge, son œil s'il est vif... Moi, il m'aurait pris la tête ainsi, il m'aurait tout simplement tué... Sauf qu'il ne m'aurait jamais pris la tête comme ça... C'est tellement facile, de tuer quelqu'un, que ça n'a vraiment aucun intérêt... Ce qui est intéressant, c'est les limites, les frontières, jusqu'où on peut aller... Alors, une feuille de salade, à côté, c'est quand même bien de la rigolade... En même temps, cette histoire de feuille de salade, je sens qu'elle va me trotter longtemps dans la tête... Être comme une feuille de salade... Être une feuille de salade... Traître?... De mon point de vue, quand j'ai glissé dessus... mais du point de vue de la feuille de salade, just'échouée là, certainement pas... Après, si un idiot qui n'a pas vu marche dessus et se brise les os, tant pis pour lui...

mardi 24 avril 2012

Il y a toujours quelque chose à lire, chez Mankiewicz. C'est écrit. Il était aussi scénariste il faut dire, et producteur. Grande époque du cinéma hollywoodien. Grand cinéaste. Son premier film, c'était pour dépanner, pour remplacer Lubitsch tombé malade, sans quoi Mankiewicz n'aurait peut-être jamais été cinéaste, juste connu comme l'affreux sacrilège producteur qui avait amputé fury de Fritz Lang de ses scènes les plus expressionnistes, du genre : Vous n'êtes plus le Kaiser de la UFA, Monsieur, bienvenue à Hollywood... Et aussitôt, dès le début, ce style à lui, cette fluidité, cette intelligence, ce raffinement. Somewhere in the night est son deuxième film seulement. Maîtrise totale déjà, finesse absolue, élégance de la mise en scène, fluidité, il nous emmène là où il veut, c'est à dire dans la nuit, quelque part... Cette signature invisible. Il faut dire que le cinéma il le connaissait déjà parfaitement, avant d'en faire, pas comme d'autres scénaristes qui se sont parfois essayés à la mise en scène et n'ont réussi qu'à faire des films bavards, sans vie, statiques, le pénible black widow me vient à l'esprit, de Nunally Johnson. Écrire un scénario, c'est une chose, en faire un film c'est une tout autre histoire. Le cinéma n'est pas la littérature, est réglé par une autre grammaire, a un autre vocabulaire, respire un autre air avec d'autres poumons. On peut avoir du style dans l'un et bafouiller dans l'autre. Les mots. Mankiewicz fait oublier à lui seul la douleur du passage au parlant. Dialogues qui chantent à l'oreille... Jamais inutiles, ni emmerdants... Même s'il aurait pu aussi faire des films muets car souvent il y a quelque chose à lire, pas forcément à dire. Alors, on lit. Des petits mots, ici et là. Ça commence par une lettre. Ensuite, le chemin est jalonné de petits mots. Sans les mots, il n'y aurait rien. Un amnésique enquêtant sur son passé, son identité. Au début, une page blanche. Puis donc, cette lettre, qui enclenche la quête de l'autre, la quête de soi. C'est alors qu'on s'enfonce dans la nuit, quand la page se remplit, que le voyage commence. Le rythme est parfait. Tout est écrit. Formidablement bien écrit. Implacable tempo. Formidablement bien mis en scène. La caméra bouge si bien, j'en parlerais presque comme d'une danseuse qu'on ne verrait pas, discrète mais si gracieuse, jamais bougeant pour rien... On est immergé dedans de bout en bout. C'est comme un rêve. Tout est à la fois familier et étranger. Qui suis-je? Qui ne suis-je pas? Une simple étiquette?... La nuit s'épaissit, plus on s'y enfonce... Le héros pousse des portes dans la nuit, ressort souvent par les fenêtres... John Hodiak, acteur que j'ai peu vu, ou crois avoir peu vu, visage comme d'encre sympathique, est tout simplement parfait, en page blanche... et Richard Conte, comme d'habitude, magistral, en méchant pas si méchant, ou en gentil pas si gentil... Nancy Guild, la fille, très bien aussi... elle pousse la chansonnette, à un moment, drôlement bien... Le moindre second rôle et même tout petit rôle est formidable, si bien écrit, si bien mené... Voilà, le cinéma, c'était quand même chouette... et Mankiewicz était grand, il fallait bien que je le dise au moins une fois...

dimanche 22 avril 2012

Je me faisais tellement chier, au boulot — il faut dire les choses, le boulot, il n'y en a plus vraiment, mon métier je veux dire, disparu, c'est tout les ordinateurs qui font maintenant, on fait un peu semblant d'être occupé par sa tâche, sa fonction supposée, on fronce un peu les sourcils à certains moments, prend des airs occupés, histoire de justifier un peu son salaire et même son existence, mais on pourrait être ailleurs... d'ailleurs c'est ailleurs que je suis, le plus souvent, à défaut de pouvoir encore être ici, car ici règnent les machines désormais et les machines n'ont plus besoin de moi pour fonctionner... autogérées, elles sont, maintenant, parfaitement, elles se réparent même toutes seules, se mettent à jour par intranet, communiquent entre elles pour se donner des tuyaux sur telle ou telle avarie... la plus grande, peut-être moi, le projectionniste, et ça ne durera peut-être pas des années cette situation pas si désagréable non plus quand on sait s'amuser, car les machines, quand même, à un moment, prendront la décision logique de m'éradiquer je crois, au moins en tant que source d'erreurs possibles et alors je me sens en sursis, mais ça n'a rien de nouveau : déjà tout gamin, je me savais en sursis... — je me faisais tellement chier, je disais, ou plutôt : j'étais sur le point de tellement me faire chier que, avachi dans mon fauteuil, les pieds sur le bureau, à contempler dans la pénombre les écrans d'ordinateurs, dans les ronflements puissants, soporifiques des extracteurs des projecteurs 4 et 5, car le bureau se trouve dans la cabine 4-5, je me suis mis à écrire dans ma tête tout un roman de science fiction, un rêve éveillé qui a duré presque tout le temps de mon poste : 9 heures. A un moment, j'ai sorti mon petit carnet à spirale de mon sac pour noter quelques phrases qui, c'est sûr, me permettraient d'en retrouver le fil et la substance quand je voudrais, le moment venu, car j'ai écrit ainsi des milliers de romans géniaux dans ma tête, me disant que ça ne servait à rien de noter quoi que ce soit, que c'était tellement génial que je m'en souviendrais forcément, le moment venu, qu'il suffirait d'ouvrir le robinet. Macache... C'est comme les rêves, vous ne notez pas, ils disparaissent... Là, c'était un genre de rêve aussi... Ça se développait tout seul, s'auto-nourrissait, il me semblait que j'étais seulement le théâtre, le lieu... Je n'imaginais rien... Ça s'imaginait tout seul... C'est là que je me rends compte que l'intelligence, la finesse, l'ego, ce qu'on voudra, n'y sont pas pour grand chose... Il vaut même mieux être faible, passif, n'être que témoin, conducteur comme l'eau, théâtre du moment pour le vivre vraiment, le laisser se développer tout seul, fonctionner tout seul, comme ce cinéma je me suis dit qui n'a plus besoin de moi... Ce roman de science fiction qui s'est écrit dans ma tête bien plus que je ne l'ai écrit était vraiment formidable, vertigineux, grouillant de détails et de vie, je crois même que dans le genre je n'ai jamais rien lu de mieux... M'en reste quelques phrases dans un carnet... Terra prime 2012, ça s'appelait... ou plutôt ça s'appellerait, si je m'y mettais un jour... mais c'est du boulot... et moi, le boulot... même si en fait le titre ne me convenait pas complètement, c'était surtout un truc pour ne pas oublier... Dans le carnet, ça commençait comme ça : "La Mère, qui pond ce qu'il y a à pondre... Les êtres asexués qui en sortent, sans anus ni organes sexuels... Les différentes castes... Les Retraits, ou Vacances... Comment ils se nourrissent... Comment la Mère pourvoit à tout... Ce qu'ils font... Le fonctionnement de leurs organes et de leur monde... Le temps linéaire, qui n'existe plus vraiment : il n'y a plus que des cycles rigoureusement identiques... Le véhicule... Cryotube?..." Alors, il y avait un voyageur, explorateur, un voyageur qui était aussi un genre de technicien, de réparateur, qui était envoyé sur Terra Prime 2012, une lointaine planète terraformée, la 2012ème pour être précis, parce qu'on avait perdu le contact, parce que Mère Prime 2012, copie de La Mère de Terra, la planète mère, s'était mise à déconner, à pondre des êtres sexués dotés d'anus fouteurs de merde... (On apprendrait bien plus tard que l'anomalie était en fait normale, prévue depuis toujours, se reproduisant même cycliquement plus ou moins à l'identique... Fondamental, le plus ou moins... Précisons que la fonction de réparateur de notre voyageur se résumait la plupart du temps à opérer une remise à zéro et qu'on l'appelait donc aussi le Razeur...)

jeudi 19 avril 2012

On t'annonce que tu as un cancer, que tu en as maxi pour six mois. Ce que je me dis, en ce moment... Six mois, c'est bien... Ça me prend, de temps en temps, comme si je me préparais, je crois même que ça me prend depuis tout gamin que je sais qu'on finit tous un jour ou un autre par caner pour de bon, basculer entièrement dans la Nuit. Y penser sérieusement, méthodiquement, désangoisse, dans mon cas, je dirais même plutôt que ça prévient l'angoisse, car ça ne me prend pas quand je broie du noir ou me sens drôle, inquiet, m'extrapolant au moindre pincement toutes les tumeurs, poumon, colon, anus, estomac, mâchoire, langue, nez, œil, os, sang, doigt, téton, peau, couille, oreille, gland, cervelle et tant d'autres, mais plutôt quand je suis bien tranquille, je rêvasse, je me projette, après je me sens encore plus tranquille, comme si j'avais réglé une affaire de la plus cruciale importance. Ça finira bien par arriver, tôt ou tard. Ça me pend même au nez, avec mes chromosomes... Il est bizarre, ce grain de beauté, là... Non?... Allez, une cigarette, histoire d'embrouillarder un peu la peur, la désorienter et même qu'elle se paume, colin-maillard, rate une marche et tombe dans le canal... A la baille! Ouste! Rien à foutre, du cancer!... Le temps alors doit prendre une tout autre importance. Moi je m'imagine bien, après le coup de massue de l'annonce quand même qui m'estourbira comme tout le monde, la pilule avalée plus ou moins de travers, plutôt con, à mettre de l'ordre dans mes affaires, dans un premier temps, même si je n'en ai pas beaucoup des affaires, mais quand même, on ne se rend pas compte tout ce qu'on a ramassé, empilé, conservé, tout liquider alors le matériel, le pesant, pas laisser toute mes merdes en héritage à déblayer avec gants en caoutchouc et masque à oxygène. Comme en pique-nique, pas question de laisser toutes ses merdes, que tout soit bien net une fois disparu, comme si personne n'était venu. Pas laisser de traces... Alors moi je viderais tout l'appartement, donnerais tout à qui voudrait bien et tout le reste à la benne, hop! rendrais les clés, puis à l'hôtel, de ci, de là, deux trois nippes dans un sac, léger, un livre ou deux, mes taoïstes peut-être,  ma clarinette pour me donner un peu d'épaisseur, façon David Carradine dans kung fu, comme en vacances, les dernières, jusqu'au bout. Moi on ne me retrouvera pas tout pourri, grouillant, irrespirable six mois après dans mon gourbi, sauf imprévu évidemment, genre infarctus ou anévrisme. L'avantage du cancer, c'est qu'en général vous êtes prévenu. Il s'annonce, le cancer, souvent même longtemps à l'avance, il est poli voire même protocolaire. Même foudroyant, il vous laisse au moins quelques mois... Semaines?... Ça laisse au moins le temps pour ranger et pour vider les lieux. A l'hôtel, ils changent les draps tous les jours. J'imagine qu'il doit y en avoir plein, des mourants, dans les hôtels, qui ont fait tout comme moi je ferai, c'est simple, on les emmène dans le drap quand ils sont raides, tout froids, parfois même encore tièdes tout juste trépassés, on en met d'autres pour le suivant. Et si ça fait trop mal, à un moment, ce cancer, j'irai me finir avec ce que j'aurai trouvé de mieux pour me finir, genre overdose d'héroïne, mais peut-être bien mieux, sur une plage par exemple, avec le bruit des vagues. Je me serai renseigné bien avant. Je suis prévoyant. Ce qu'il y a de mieux. J'ai vu mon père cancéreux terminal sans le savoir même s'il devait bien se douter, poumons et cerveau, traité au doliprane, les yeux tout brouillés qui clignotaient tellement il avait mal mais il ne l'aurait jamais dit, il endurait, stoïque dans son genre, sourire idiot virant grimace, devait à certains moments voir double ou même triple ou même cent comme les mouches... Moi, ce ne sera pas la même chanson. Alors j'irai me promener, avec mon sac, là où mes pieds me mèneront, jusqu'à ce qu'ils ne puissent plus. Moi qui ne suis pas du tout attiré par les drogues, je crois bien qu'alors elles me tenteront beaucoup, ne serait-ce que pour ne pas avoir trop mal. Je ne veux pas avoir mal. C'est simple. Juste ça. Mourir, passe encore, mais agoniser en me tordant de douleur avec des râles affreux ou faire des bruits d'évier comme mon père, certainement pas. Peut-être que j'aurai envie de retourner à certains endroits où je fus heureux ou malheureux voire les deux. Mais peut-être pas. Là ou ailleurs, finalement... Regarder le soleil se lever. Regarder le soleil se coucher. Écouter les bruits. Sentir ce qu'il y a à sentir. Point... Et puis, quand on regarde bien, et même au microscope, un cancer, ce n'est pas si moche... Psychédélique, là, un peu... non?... Et puis de la musique... Coltrane... Les berceuses si douces des îles Salomon... Deux trois choses comme ça qui me touchent, qui m'emmènent... Je voudrai réaliser quelque chose d'extraordinaire à quoi j'aurai rêvé toute ma vie?... Pas même... Des choses simples... Boire un café... Fumer une cigarette... Caresser un chat... Sourire à une inconnue... Voire les 4 en même temps... Rêver, aussi, comme j'aurai rêvé toute ma vie, car je suis un rêveur, c'est ainsi, et un rêveur ça rêve... Les quelques rares grands rêves que j'ai réalisés, grands à mes yeux mais si minuscules à d'autres, pour pas quand même mourir trop couillon, même si on meurt toujours très couillon, génie ou abruti c'est idem, ne m'ont apporté qu'amertume de toutes façons, même si pas que, il faut être honnête, je ne regrette alors rien, pas même l'amertume... Revoir des personnes qui auront compté pour leur faire mes adieux?... Bien trop mélodramatique... Ils ne me reconnaîtraient d'ailleurs peut-être pas, j'aurais bien l'air idiot encore une fois, ça en deviendrait même comique... Je crois que d'instinct, comme les éléphants, lentement et je crois gracieusement, je parle pour les éléphants, j'irai plutôt me trouver un cimetière à mon goût...

mercredi 18 avril 2012

Prisonnier de la mer. Celle de Kellermann, Bernhardt, 1910. Ça fait un moment. J'arrive plus à en sortir. Je le finis, je le reprends, boucle vicieuse, venteuse, qui me ramène au point de départ inexorablement, moi, âme si légère, si finement nervurée, feuille morte tournoyant, jouet du Vent. Nous avions tout ce que le cœur peut désirer. Nous avions des femmes à foison, nous avions à boire, nous avions des tempêtes qui tourbillonnaient à une vitesse de quatre-vingt nœuds. Nous n'avions besoin de rien : merci, passez votre chemin... Ça commence comme ça. Adieu, mes amours, dis-je, l'oreille tendue aux voix, adieu, je reviendrai! Ça finit comme ça. Et alors, je reviens, au début, pas le temps de dire adieu ni ouf! que je suis déjà de retour. Ça ne finit pas. Il est toujours sur la chaise en paille près de mon lit. J'arrive pas à le ranger dans la bibliothèque. C'est un chant. Comme on disait avant. Dante, ses chants... Ça chante... Mais attention, là c'est pas l'sirop à Voulzy avec guitares hawaïennes et dents du bonheur... Là, c'est l'Ouessant mugissant, terrible et magnifique, mythologique!... Alors Ouessant, je connais bien, maintenant, et même intimement, j'y ai glissé au moins un doigt, comme on dit, même si je n'y ai jamais foutu les pieds... Ça souffle, ça tempête même énormément, là-bas, sur l'île... Et puis Roseher... Ah... Roseher... Et le phare... Ouessant, j'irai, un jour, mais peut-être pas car je connais tellement déjà intimement... J'y suis, à Ouessant, en boucle, dans la mer, depuis un bon moment, alors... qu'y trouverais-je si je m'y rendais chair et os?... J'ai vu un téléfilm, il n'y a pas longtemps, qui se passait à Ouessant... c'était quand même bien moins surprenant, stupéfiant, sauvage et décoiffant... Joli, c'était, à peine ça remuait un ou deux cheveux sur le front... Quand même bien moins remuant... Mais j'irai, quand même, un jour, à Ouessant, voir au moins s'il y a encore Roseher... et Creac'h, le phare, s'il est toujours debout... en espérant qu'il y aura une tempête monstrueuse et que j'entendrai aussi l'homme que la mer rejette... En attendant, je suis prisonnier de la mer, du Chant... J'apprends aussi qu'à l'automne des films bretons de Jean Epstein seront enfin de nouveau visibles... Vivement!... En attendant, je lis la mer... Parce que je suis marin, moi, au fond, même si ça ne se voit pas... Et pas qu'un peu...

lundi 16 avril 2012

Il faut remonter loin pour être de nouveau subjugué. Pour voir quelque chose de vraiment neuf. Cœur fidèle, par exemple, Jean Epstein, 1923. Un film d'avant-garde? Il me semble qu'aucune troupe n'a suivi l'éclaireur. Dommage. Ou pas dommage, car finalement tout était accompli et l'éclaireur n'a illuminé que son propre chemin. Et comment!... L'histoire est très banale : Marie aime Jean et Jean aime Marie. Mais le tuteur de Marie la force à épouser Petit Paul, un vrai lascar qui picole et la bat. Il y a aussi une jolie infirme avec un pied-bot. D'ailleurs, elle est bien plus jolie que Marie. Elle est la messagère puis même à la fin la main de la Justice. C'est le fil. Suivi par un autre qu'Epstein, ç'aurait sans doute été très ennuyeux. Il a aussi écrit le scénario, Epstein. Il ne s'est pas trop foulé. Il lui fallait un prétexte, une toile blanche. Le scénario, c'est la toile blanche. Celle-ci plutôt qu'une autre finalement quelle importance... Quand à la fin Jean et Marie sont enfin réunis, Jean continue de tirer la gueule comme pendant tout le film. Il tient enfin pour de bon et pour toujours sa Marie dans ses bras mais il regarde ailleurs, loin, on ne sait pas trop où, gravement, juste peut-être dans le vague. On ne l'aura jamais vu rire, ni même sourire. L'Amour, c'est pas la joie. Il y a même une sorte de vague et immense tristesse, dans son accomplissement, malgré les feux d'artifice. Ils se retrouvent sagement enlacés sur le manège qui tournoie, le même manège où le vulgaire, visqueux, méchant Petit Paul avait emmené Marie pour la tripoter de ses mains ignobles aux ongles sales, lui soufflant son haleine vinasseuse dans le cou... Toujours le même manège...

jeudi 12 avril 2012

Ce soir, je revois la vie d'O'haru femme galante. Rendez-vous est pris. Je m'y prépare. C'est comme une éclipse totale de soleil annoncée. C'est rare. Il faut que ce soit rare. (Plutôt de lune, je me dis, car autant chez Ozu j'y vais en fin d'après-midi, pour en finir au crépuscule, autant chez Mizoguchi j'y viens la nuit.) L'envie doit mûrir, jusqu'au moment qui est le moment, où on est enfin prêt à le revivre. Il ne s'agit pas seulement de passer un moment, d'occuper son temps et on ne retrouvera jamais l'émotion par une simple réaction de cause à effet du genre je possède le film il me suffit de le remettre dans la machine pour le revivre à l'identique sinon on le passerait en boucle, on vivrait même dedans à perpétuité, on finirait aussi sans doute par l'user, le vider de sa substance qui est à la fois en dedans et en dehors de lui. Il faut prendre rendez-vous, que le moment soit le moment. Le rendez-vous est parfois pris longtemps à l'avance, parfois quelques minutes seulement avant. C'est le film de Mizoguchi que j'ai le plus vu, que j'ai eu le plus souvent envie de revoir et auquel je pense toujours en me disant : Quand reverrai-je enfin O'Haru? (Car je sais que je la reverrai encore, encore et encore, jusqu'à ma mort...) Aucune vision n'est anodine et toujours je m'y prépare, parfois même longtemps à l'avance. Ce soir sera parfait. Je le sens. Je le connais par cœur, ce film. Mais je le revois toujours d'un œil neuf. Ou plutôt il me rénove l'œil, si j'ose dire, à chaque fois c'est la renaissance à la fois du film et de mon œil. Parce que je le connais par cœur, que j'en sais la pulsation intime. La dernière fois que je l'ai vu, j'en avais parlé des heures juste avant à des amis en visite dans ma tanière, j'en avais parlé je crois le temps du film juste pour évoquer un travelling sublime vers la fin que je voulais leur montrer (oh... juste quelques minutes...) mais je pouvais difficilement leur montrer sans l'introduire, dire ce qui l'amenait le travelling, car il n'était rien, le travelling, sans tout ce qu'il y avait autour. J'avais dû bien les saouler, je m'étais dit, après... Quand, enfin, je leur ai montré le travelling en question, je me suis aperçu qu'en fait ce n'était pas un travelling, mais un enchaînement de travellings et alors tout mon discours préliminaire tombait à l'eau... Le film, une fois de plus, s'était joué de moi... Je ne vous ai pas trop saoulés avec mon bavardage?... Ils sont polis, gentils, n'auraient jamais osé dire qu'oui, forcément, énormément, tout ce temps, pour voir ce travelling qui était en fait un enchaînement de travellings, et moi, gesticulant, dans ma passion... Alors, là! vous voyez... Alors, ils ont enfin vu l'extrait, poliment... Ah oui, c'est un vieux film... Moi, regardant ma montre : Retiré du contexte, ça ne veut plus dire grand chose... C'est con, les extraits... Finalement, peut-être que ça aurait été mieux qu'on le regarde entièrement, au lieu que je vous en parle interminablement et que j'en dise en plus n'importe quoi... Vous voulez que je vous le prête?... Oh... une autre fois peut-être... (Parce que mon désir de leur donner envie m'avait seulement donné envie à moi...) Bon... Et autrement, ça va?... Ton dos, ça s'arrange?... Et toi, tes rayures, ça avance?... Un verre de thé?... Je remets d'l'eau... Oui, c'est vrai, on est bien, chez moi... (Parce que Corinne me dit toujours qu'on est bien, chez moi...) En tout cas, moi, j'y suis bien... Adapté à ma flemme, chez moi, oui, parfaitement... Z'entendez l'oiseau, là?... Et Mouchette, ma jolie chasseuse de piafs, vive, arrêtant soudain de se lécher langoureusement, impudiquement devant tout le monde, vautrée tout son long sur le tapis, avait tourné la tête au même moment que moi...

dimanche 8 avril 2012

Après l'extraordinaire les diamants de la nuit (démanty noci, 1964), j'ai évidemment eu envie d'en voir d'autres du mystérieux Jan Němec, cinéaste rare aux œuvres rares souvent brèves, rapides, denses, rythmiques, oniriques, sombres et soudain étincelantes et me suis procuré la fête et les invités, 1966 (je nais). Ce n'est pas seulement une satire du communisme, du totalitarisme, tout comme les diamants de la nuit ne parlait pas seulement d'eau low-cost. Cette époque est déjà loin. Tandis que le film est toujours là, hors du temps. Finalement, rien n'a changé, à part peut-être le décor, les costumes. Le Style ne vieillit pas. Il ne se conformait pas à une mode. L'air qu'on y respire n'est pas celui du temps jadis, derrière le rideau de fer. C'est son air à lui, de son temps à lui hors du temps. Derrière le rideau de fer. Il est toujours là, le rideau de fer. Il sera toujours là. Il y aura toujours aussi des chasseurs et des gibiers, c'est ainsi. Il n'y a pas grand chose à en dire, tellement tout est évident, dans la sinuosité, le malaise. Il n'y a qu'à respirer cet air hors du temps... La nuit suivante, j'ai fait un rêve. J'étais invité, dans une fête... Elle aussi, elle était invitée, je la sentais, la savais là, elle qui avait disparu depuis si longtemps, une éternité, y compris de mes rêves... Mais je ne voulais pas la voir. Tout ce temps j'avais tellement désiré la revoir, la cherchant dans mes rêves et maintenant qu'elle était enfin là, je ne voulais plus... Cette fête était un peu un traquenard. Tous les invités semblaient à leur place, formaient un genre de communauté joyeuse de gens à l'aise en bonne société, élégants, légers, ayant réussi leur vie, comme on dit, ce pour quoi ils étaient programmés... Moi, j'étais l'ami de la coiffeuse, c'est tout... Alors, je suis allé en bout de table et ai pris la parole, m'adressant à la fois aux invités et à elle que je savais là, toute proche, qu'à tendre le bras ou tourner la tête à peine, avec son mari : "Je n'ai rien à faire ici, c'est juste à cause de ma coiffeuse que je suis venu, pour lui faire plaisir. Je vais vous laisser entre vous. Et toi, je ne vais même pas te regarder. Juste quelques mots pour te dire que tu n'auras pas un regard de moi. Ce n'est pas du mépris. C'est juste que je ne supporterais pas, de te voir, ici, parmi les invités, dans ton monde, tellement dans ton monde, épanouie, souriante et même rayonnante. Je te félicite pour ta réussite et ton bonheur qui doivent même j'en suis sûr se lire sur ton visage, même si je ne les envie pas du tout car je crois que ce n'est tout simplement pas ma voie et maintenant je m'en vais..." Alors je suis parti, accompagné de quelques ricanements... C'est qui, ce fou?... Après, marchant seul dans la nuit au bord d'un canal à l'eau noire ridée d'éclats de lune, j'ai parfois un peu regretté, de ne pas l'avoir regardée, alors qu'elle était si proche... Puis je n'ai plus regretté... J'aurais souffert, bien trop souffert, et je ne veux plus souffrir... J'ai eu l'impression aussi qu'elle me suivait... Au début, inquiet, ému, je me suis arrêté et retourné plusieurs fois... Puis je ne me suis plus retourné... La fête, ce n'était pas pour moi... J'ai repensé alors à ces mots étranges de Lao Tseu : "Chacun s'échauffe et se dilate... Comme s'il festoyait au Sacrifice du Bœuf..."...  Me suis mis bientôt à siffloter mon air, poursuivant mon chemin solitaire...

jeudi 5 avril 2012

Un nouveau cinéma. (Mon dixième.) Une nouvelle rue. C'est là où je fume. Je regarde. J'hume. Dès que j'ai un moment et il faut dire que j'en ai très souvent, je me retrouve dans la rue. Juste en face, il y a un sex-shop, et à côté du sex-shop, il y a un kebab. Il y a des gens qui entrent, dans le sex-shop, dans le kebab, parfois même ils passent de l'un à l'autre. C'est la première chose que je regarde, quand je commence dans un nouveau cinéma, la rue, où je pourrai fumer. Dans le cinéma précédent, quand je fumais, j'avais le cul de l'Hôtel-Dieu, un peu triste, le ciel, le soleil jusqu'en début d'après-midi. Maintenant, j'ai un sex-shop et un kebab. Ça change. J'aime bien, être dans la rue, regarder ce qu'il se passe. Je fais vite partie de la rue. Je discute avec la petite vieille qui promène son caniche ou alors avec le caniche. Je salue le facteur. Je me fais draguer par un retraité homosexuel. Je me fais draguer par une jolie étudiante fausse rouquine. Je finis par connaître un peu les gens, leurs allées et venues. Il y a une jolie fille qui travaille dans une boutique de fringues à côté du kebab. Le premier jour, elle fumait, un pied contre le mur, devant sa boutique. On s'est regardés longtemps, en fumant. J'ai cru qu'elle tapinait (la proximité avec le sex-shop...), au début, avant de comprendre qu'elle était vendeuse dans la boutique de fringues, dans cette rue un peu cracra... Si ça se trouve elle ne me regardait pas et je l'ai juste imaginé, dans ma myopie. Toujours est-il que je me suis demandé si elle ne m'aguichait pas et qu'au bout d'un moment, pudiquement, j'ai détourné le regard. (Était-ce la même, le lendemain matin, qui balayait devant l'entrée de la boutique de fringues, quand je suis passé devant pour faire l'ouverture du cinéma?) Je regarde. Je m'imprègne de l'endroit. Le macadam aussi, au ras du sol, qui est changeant comme le ciel quand on sait regarder.

mardi 3 avril 2012

Je fais un métier dangereux. J'ai l'air comme ça de ne rien foutre, quand je risque ma peau à chaque instant.
Les photos ratées sont bien souvent les meilleures. Il faudrait savoir en rater plus souvent. Hélas, ou heureusement, ce n'est pas un savoir. C'est l'accident, ou l'incompétence, ou je ne sais quoi, la désinvolture, le je-m'en-foutisme, le hasard, qui produisent le ratage. Si on pouvait tout rater comme on rate une photo, ce serait magnifique. Un instantané. On ne revient pas dessus. Alors que beaucoup de ratages sont ou deviennent des ratages parce qu'on est revenu dessus, des moments médiocres qu'on a voulu améliorer, transformer en belles choses, qui n'auraient peut-être pas été des ratages si on ne s'était pas acharné à vouloir sauver ceci cela, à parfois même vouloir y imprimer tout autre chose, un genre de mensonge alors, pour que l'image soit mieux, plus acceptable, flatteuse, ou bien auraient été des ratages magnifiques qu'on aurait peut-être su apprécier bien plus tard. Il faudrait peut-être apprendre à ne rien vouloir améliorer, arranger, se contenter d'instantanés, sans regrets. Accepter aussi que l'image se soit formée malgré soi. Et mieux vaut un ratage total qu'un à peine ratage. Ça vaut pour tout. Me le dire me console de bien des choses, me fait même me sentir à l'instant magnifique, moi qui ai tout raté, même si je sais que l'effet passera vite. Il y a des regards en tout cas qu'on n'oublie pas. Ceux qui disent que les bêtes et notamment les chats n'ont pas d'âme sont des cons.