vendredi 10 février 2012

Il aimait bien faire pleurer les filles, Raffaello Matarazzo, particulièrement Yvonne Sanson, ici dans tormento. On imagine que déjà tout petit, dans la cour de récré, il devait s'entraîner. Une fille, il faut que ça pleure, que ça souffre, longtemps, même si elle n'a rien fait de mal, surtout si elle n'a rien fait de mal. Alors, dans tormento,  le mari est en prison pour un crime qu'il n'a pas commis. Elle est bientôt forcée d'entrer au couvent pour sauver sa petite fille de la misère voire d'une mort imminente. Elle ne la reverra plus, sa petite fille, c'est le prix à payer. La vie au couvent et tout le saint-frusquin elle ne s'y fait pas du tout. Si encore elle avait quelque chose à expier... Heureusement, ça finit toujours bien, parce que Raffaello, s'il aimait faire pleurer les filles, le bourreau de la Sanson, à un moment quand même il se disait ça a assez duré, elle a assez pleuré comme ça, rendons-lui ce qu'on lui avait enlevé, on ne va quand même pas la faire mourir, cette petite, ça ne voudrait plus rien dire, faisons comme Dieu avec Job. Sauf que là c'est une fille. C'est beau, une fille qui pleure. Jusqu'à l'épuisement si possible. Pour voir... Quoi de mieux que faire pleurer une fille? La faire rire, c'est facile... La faire pleurer... tout un art... Après, on peut la consoler, au moins... Je me souviens en avoir fait pleurer une, mais sans larmes, bruyamment, à sec, du coup je m'étais dit qu'elle me faisait du cinéma, qu'elle faisait un peu l'actrice elle qui en plus avait voulu être actrice et je n'y avais pas vraiment cru... Une autre, après une scène, revenant des toilettes où elle était partie très longtemps, m'avait dit sans la moindre émotion y avoir pleuré très très fort, sauf que ses yeux étaient restés tout secs et son visage sans stigmates et là non plus je n'y avais pas vraiment cru... Plus tard, je m'étais dit que dans les deux cas j'aurais dû les faire pleurer vraiment et même qu'elles le désiraient profondément et que c'était même pour ça qu'elles m'avaient fait ces scènes de pleurs factices, parce que j'avais été incapable de les faire pleurer vraiment, parce que ça faisait partie du rituel, de la mise en scène, l'orgasme lacrymal... On se sent un peu minable, dans ces cas-là, comme jouissant médiocrement dans une femme qui simule... En tout cas, je n'y ai pas cru... Si j'y avais cru, ça aurait peut-être bien tout changé... Que de frustration, de part et d'autre... C'est peut-être le drame de ma vie, n'avoir jamais su ni même voulu faire pleurer une fille, même pas dans la cour de récré... en tout cas n'y avoir jamais vraiment cru...

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