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samedi 28 février 2009
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mercredi 25 février 2009
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lundi 23 février 2009
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vendredi 20 février 2009
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jeudi 19 février 2009
Je suis assez soulagé de constater que personne ne vient sur mon blog. C'est drôle, cette idée que j'ai eue de faire ça, comme des millions de personnes, m'exposer ainsi, pour voir, mais comme tout le monde s'expose aux yeux de tout le monde, ça ne veut plus rien dire, ça revient même à cultiver l'anonymat, la solitude, dans cette formidable utopie du web où l'Être rejoint le Néant ou peut-être l'inverse. Je crois que je continue justement parce que personne ne vient, comme j'écrirais dans un carnet que je laisserais ensuite sur un banc public. Le jour où quelqu'un trouvera le carnet, je ne pourrai peut-être plus écrire dedans, si je ne le retrouve pas là où je l'ai laissé. En attendant, je trouve ça amusant et je viens, de temps en temps, m'asseoir sur mon banc. C'est un banc très en retrait du chemin. Il faut savoir qu'il existe pour pouvoir venir s'y asseoir. Ou bien alors en flânant, peut-être, on peut tomber dessus, même si le panorama, de mon banc, n'est peut-être pas extraordinaire. C'est mon banc, j'y ai mes habitudes, voilà tout. Il y en a plein d'autres, plus ou moins visibles du chemin. J'avoue qu'ils ne m'intéressent pas du tout, les autres bancs. A chacun son banc. Je n'ai pas le sentiment, ici, de faire partie d'une communauté. Ça me rappelle quand j'étais gamin, à l'internat, chez les curés. On avait tous un petit placard, à côté du lit en fer. On le fermait avec un cadenas, on y mettait des choses précieuses, des gâteaux, des bonbons, des illustrés, un Play-Boy ou un Lui, quelques sous. Certains même le personnalisaient, installaient une petite ampoule qui s'allumait quand on ouvrait la porte. C'était un petit coin à soi, intime, dans ce monde uniformisé, fermé, suffocant. On ne le faisait pas pour que les autres le voient, c'était caché, même si on aimait bien quand même que les autres le voient un peu et trouvent ça bien. Moi, je me suis vite lassé, de mon placard, car il m'a vite foutu le cafard, ce placard. L'odeur des chamonix orange que me donnait ma mère y régnait, mêlée à celle des vieilles chaussettes, et c'était l'odeur de la solitude, de l'abandon. Le soir, des nonnes jouaient de lugubres airs sur le carillon de la cathédrale de la visitation qui surplombait l'école. Je me sentais orphelin. J'avais dix ans, je sanglotais dans mon lit, la nuit, sous le drap, en grignotant mes gâteaux écœurants, en guise de réconfort, en cachette, honteusement, perdu dans ce long dortoir obscur d'une quarantaine de lits. (Puis
sont venues les caries, les rages de dents...) Aujourd'hui encore, l'odeur de ces gâteaux me noue la gorge et juste apercevoir l'emballage dans un rayon de supermarché me fait légèrement grimacer. Dans les prisons, ils font la même chose, avec leurs placards. Et sur internet, on peut créer son blog, son placard et internet alors est une sorte de grand dortoir plein d'enfants abandonnés, chacun caché sous son drap à se réconforter honteusement comme il peut. Il y a quelques mois, j'ai vu un film magnifique de Richard Fleischer, son premier il me semble : Child of divorce. A la fin, les deux petites filles, à l'internat, sont devant la fenêtre et le clocher tout proche se met à carillonner. Alors, sur mon canapé, tout m'est remonté et je me suis mis à sangloter.
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mercredi 18 février 2009
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Relire Vie de Samuel Belet a été comme retrouver un ami très cher. Il me raconte toujours un peu la même histoire mais j'aime tellement entendre sa voix. Dans sa voix il y a la terre, le vent, l'eau et le feu. C'est tout simple. Ça parle directement, sans finasser, humblement. Il me parle de moi-même, Ramuz, Charles-Ferdinand, dans ce livre, car je suis Samuel Belet, au fond, là, il n'y a que le lac à traverser. J'y suis d'ailleurs allé, l'été dernier, y faire un petit tour, mais plutôt vers Montreux, rendre visite à Christian, un ancien voisin de la rue du Bœuf devenu camarade de beuveries et discussions philosophiques autour d'une boîte de sardines, qui s'est rabiboché quinze ou vingt ans après avec son ex-femme vaudoise. (Sa fille s'appelle Reine, vit à Neuchâtel et je l'aime beaucoup, Couicouine.) Bref, je suis allé voir Christian, dans une campagne par là-bas, et il m'a emmené boire un coup au bordel, juste pour le plaisir de répondre, goguenard, à son ex-ex-femme, le soir, à la question habituelle du vous avez fait quoi : on est allés aux putes... C'est là que j'ai fait la connaissance de Suzanna. Elle devait à peine avoir vingt ans mais son corps semblait déjà bien fatigué, était portugaise, venait de Coimbra. Je vous trouve très bien, m'a-t-elle dit en s'installant à notre table... Toi vouloir amour avec moi?... C'est un pays bien étrange, la Suisse. On y trouve des bordels en plein jour, avec terrasse, en bout de zone commerciale, en pleine campagne. (Le Cheyenne, déco hacienda mexicaine, banquettes simili vaches tachetées... C'est un ancien juge, il paraît, qui a monté l'affaire...) On y voit aussi des nuées de gigolos, à Montreux, au bord du Léman, promenant le caniche ou le lévrier de madame. Je repense parfois à Suzanna, je me souviens bien de son visage, ses sourcils noirs très épais, ses lèvres trop rouges, sa façon timide de baisser les yeux, sa peau laiteuse, ses seins lourds, j'imagine ce que doit être sa vie. Elle n'était pas très à l'aise, débutais je crois dans le métier. (Une de ses collègues, une volcanique Espagnole au déhanché ahurissant, avait toujours un œil sur elle, l'encourageait de loin tout en caressant la nuque d'un pépé sec et rougeaud. J'aurais aimé avoir l'audace de sortir ma petite caméra...) Elle a semblé très vexée et est partie sans un mot quand, au bout d'un quart d'heure, je lui ai dit qu'on était seulement venus boire un verre et que je ne voulais surtout pas lui faire perdre son temps et que si j'étais venu pour ça, sans hésiter, j'aurais dit oui, car elle était très jolie. Ce que je ne lui ai pas dit, c'est qu'elle était très émouvante, dans sa maladresse et que, pour le coup, j'en serais peut-être tombé amoureux, si on était allés plus loin, façon prince Mychkine, je me connais, il ne valait donc mieux pas, je crois.
dimanche 8 février 2009
mercredi 4 février 2009
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J'ai tout lu et ne suis pas loin de tout avoir relu Cormac Mc Carthy. Je me souviens précisément de l'instant, il y a une dizaine d'années, où j'ai pris, à la bibliothèque, un peu au hasard, avec toute une brassée d'autres livres que j'ai oubliés, le gardien du verger. Je sortais de ma période Jack London, venais aussi de lire un peu Jim Harrison. Je me revois, la tête penchée, lisant le titre sur la tranche, le doigt dessus, hésitant. Sobre, élégant, ce titre, je m'étais dit. Je l'ai lu un peu péniblement, jamais vraiment plongé dedans, souvent dérouté par le style. Peut-être une année a passé. J'ai alors lu un enfant de Dieu, pour lui donner une seconde chance, qui m'a estomaqué. La première fois que je me suis retrouvé ayant tout lu Cormac Mc Carthy, j'ai frôlé la dépression. Que vais-je pouvoir lire, maintenant, la chair est triste, hélas, et caetera... Puis j'ai commencé à le relire, le gardien du verger y compris, et c'était encore mieux. A la fin de la route, je me suis une fois de plus senti immensément orphelin.
lundi 2 février 2009
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