mercredi 26 novembre 2008

Ce film n'est sans doute pas le meilleur de Douglas Sirk. Pourtant, si je devais n'en garder qu'un, ce serait celui-ci, peut-être parce que c'est le premier film de Sirk que j'ai vu, il y a une vingtaine d'années et que j'en suis encore tout retourné. Lana Turner n'est pas la plus subtile des actrices? John Gavin est un peu fade? S'il en était autrement, le film ne serait pas aussi fort, je crois. Pour ce rôle il fallait une actrice qui joue un peu faux, à la limite du rictus parfois, et qui joue faux pour de vrai, ce qui n'est pas évident. Tout est dans le titre : Imitation of life. Il s'agit d'imiter. Mais où est le modèle? Dans le miroir? Ou alors est-ce le reflet? Ou alors n'est-ce qu'un fantasme? Le rêve américain? Pas seulement américain. Ambition et amour ne font pas bon ménage. Qu'est-ce que la vie? Qu'y a-t-il donc à imiter? Faire semblant de ressentir ce que l'on ressent vraiment, écrivait Fernando Pessoa. Est-ce du même ordre? Mais alors, que ressent-on vraiment? Regarde comme tu es devenue laide, ai-je envie de lui dire, si seulement tu es encore capable de voir quoi que ce soit, ou d'entendre quoi que ce soit. Je le dis sans méchanceté, plutôt avec tristesse, avec fatalité. Au fond, c'est tragique. Comme tu es devenue superficielle, mon amour, fausse, une caricature de toi-même, ça me rend malade... Ah... ce film est d'une effroyable cruauté... Ce n'est pas seulement un mélodrame flamboyant, ni un film sur la question raciale, c'est un film sur la vanité, la laideur définitive qui en découle... et d'autres choses encore... C'est un miroir... Pauvre conne... Ça me donne envie de revoir Imitation of life, la version de Stahl, 20 ans plus tôt, avec Claudette Colbert, dont le film de Sirk est un remake. Le film est beaucoup moins cruel, mais il se regarde avec plaisir, c'est même un très bon film, mais dont les enjeux sont ailleurs, il y a même des moments irrésistibles de pure comédie. Claudette Colbert y est formidable, pétillante, à croquer. Ce qui me donne envie de revoir New York Miami (It happened one night, en vo) peut-être mon Capra préféré. Un drôle de road movie, des moments d'une extraordinaire poésie. C'est presque l'antidote d'Imitation of life, tout en légèreté, une ballade. Elle découvre le monde, la vie, l'amour, fuyant sa triste condition de fille de milliardaire, elle dort dans la paille, s'endort dans un bus sur l'épaule de Clark Gable, le veinard... Elle se met à regarder les petites gens... à apprécier les choses simples… mais essentielles, comme l'art de la mouillette par exemple... On rit beaucoup, dans ce film, et c'est plein de tendresse. Après Imitation of life, pour survivre, il faut revoir New York Miami, ce que je ferai désormais systématiquement.

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