mercredi 3 avril 2013

Œil de très grand corbeau, œil de baleine, de bœuf ou de perdrix, je ne sais plus vraiment. L'animal me regardait, en tout cas, ça j'en suis sûr, et je me voyais dans son œil qui me regardait et je savais que j'allais disparaître, à un moment ou à un autre, soit qu'il ne me regarderait plus, soit que je cesserais de le voir et alors de me voir dans son œil me regardant, tout simplement peut-être parce que j'aurais cessé de voir, qu'un voile aurait peu à peu tout obscurci. Un voile sur mon œil, ou alors sur le sien. C'est là que je me suis dit que c'était peut-être moi, le Grand Corbeau, car c'était un grand corbeau, je ne vais pas continuer à me voiler l'œil en supputant un animal plus rassurant, oui, un grand, très grand corbeau, sur sa branche, qui me regardait et je me voyais dans son œil qui luisait comme une flaque de pétrole, parfaitement, dans mon rêve, et le matin, à l'aube, une corneille s'est posée sur une antenne télé et le grand corbeau m'est revenu : effroi. Mais c'était peut-être moi, le Grand Corbeau, juste moi, je me dis maintenant. Et le reflet dans son œil? Une projection, rien de plus, anthropomorphe. Ça aurait pu être n'importe quoi d'autre. Un humain, voilà, la projection, je serais un humain, comme on dit dans l'enfance quand on joue. Et j'ai fini par y croire, à cette projection. Un humain. Je serais un humain, on dirait. Alors que je suis le Grand Corbeau. J'aurais préféré éléphant, ou baleine, renard ou chat. Je n'ai pas choisi. Quel effroi, de se rencontrer. On se rejette alors très loin. Mais maintenant, je me dis que ce n'est pas si mal, grand corbeau.

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