Quel bonheur de pouvoir voir et revoir encore la mort aux trousses... Autour de minuit, l'envie me prend... Et je peux... Je l'ai... Je peux le voir autant de fois que je veux... Si j'avais su, quand j'avais dix ans, que j'aurais ce privilège... C'était le film qui suspendait le temps... C'était même un trou dans l'espace-temps... La vie, ce qui m'attendait, ne me réjouissait pas beaucoup... L'angoisse me nouait... J'avais parfois des crises terribles et je me roulais par terre en me tenant le ventre... (Un boyau qui se tord, disait le médecin de famille, qui était très gentil...) Mais là, pendant la mort aux trousses, tout disparaissait, j'étais happé... J'aurais aimé que ça dure l'éternité... Magie du cinéma... De ce film, en particulier, pour le gamin de 10 ans que j'étais, de 43 ans que je suis... La nuit m'appartient... Je n'ai plus ces angoisses de quand j'avais 10 ans, mais j'ai conservé le goût immodéré pour ce film... Je suis émerveillé à chaque fois au moins autant que la fois précédente... Quelle splendeur... Quel rythme endiablé... Et puis je ris, même si je connais toutes les répliques par cœur... (La scène dans l'ascenseur avec sa mère et les deux tueurs... juste m'en souvenir me fait glousser...) Et puis je suis toujours autant ému quand je vois Eva Marie Saint... Quelle grâce... J'en ai les larmes aux yeux, quand je la vois... La petite musique mélancolique de Bernard Herrmann, pendant les scènes d'amour... Comme c'est douloureux, au fond, l'amour, mon amour, comme si sa jolie main vous étreignait le cœur à nu, à vif, tendrement... Comme le technicolor était beau... Comme toutes les choses étaient belles, les voitures, les architectures, les compartiments de train, les robes d'Eva Marie Saint... Eva, qui s'appelle Eve, dans le film... Comme Cary Grant était drôle... Comme James Mason était fin... Comme Hitchcock était grand... Quel curieux mélange...
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