mercredi 26 septembre 2012

On dirait que je serais mort. Personne n'en saurait rien. Pas même moi. Mon harem de lectrices enamourées, inquiètes et frustrées, finirait peut-être par se manifester, au bout de quelques mois, laissant des commentaires idiots mais touchants, midinets, qui ne seraient évidemment pas publiés. Puis elles se feraient une raison, finiraient même par oublier. C'est finalement comme un feuilleton télé qui se termine sans se terminer, faute de budget, faute d'audience, faute même d'envie. Il n'y avait pas de scénario. Le mortel ennui a fini par gagner tout le monde. On venait voir par habitude, c'est tout. Là où ailleurs... On s'endormait un peu devant, avant la sieste, c'était un peu comme Derrick... L'âme s'échappe-t-elle par la bouche? Par les yeux? Ou alors dans un dernier pet va rejoindre le Grand Trou dans la Couche d'Ozone? Le dernier pet, ça ferait un titre bien... non? Ou alors il n'y en a pas, d'âme, et on s'éteint comme une télé à tube cathodique, un flash accompagné d'un grésillement comme une poignée de sable et un petit point blanc ensuite au centre de l'écran qui finit aussi par disparaître. Moi j'en sais rien. J'ai fait longtemps ce rêve. Je faisais le mort, pour voir ce que ça faisait, s'il y avait des gens qui viendraient me voir, me toucher, me parler, si je comptais. Parfois oui. Parfois non. En fait c'était surtout pour qu'on vienne me toucher. Ça pouvait devenir très sexuel et je bandais alors très dru. C'était le bon moment pour ne plus faire le mort. Sauf que j'étais vraiment mort... Raideur cadavérique... Au moins, ça dure longtemps... Je me faisais une raison... J'apprenais à me contenter de ce que j'avais... J'étais regretté, au moins, on m'avouait des choses inouïes, on me désirait, même mort, surtout mort, ce n'était pas rien... Je me sentais important, finalement plus vivant mort que vivant... Certes je ne pouvais plus bouger ni rien communiquer... Qu'aurais-je dit de toutes façons?... On ne parle pas de la même façon aux morts qu'aux vivants... Si je m'étais ranimé, je me serais sans doute fait insulter, traiter de pervers, de salaud... On m'aurait peut-être même lynché... Mais là, mort, on m'aimait... Des filles venaient sans préambule me chevaucher tendrement ou sauvagement selon... ou juste me branlaient gentiment, le regard embué, comme on secoue un mouchoir blanc dans une gare pour dire adieu, ou me suçaient, en soulevant leur voile de crêpe, même si toutes n'en portaient pas... ça dépendait des fois... C'était chouette, même si j'éjaculais toujours dans l'autre monde, c'est à dire plus dans le rêve, mais dans mon lit, et que la conscience de la pollution en train d'avoir lieu gâchait quelque peu le plaisir, ne serait-ce que par crainte d'en foutre partout, ce qui m'incitait à maîtriser autant que je pouvais la puissance et l'intensité du jet par toutes sortes de techniques manuelles mais aussi mentales, dans un soucis au pire d'émission lente et contenue dans un périmètre sanitaire délimité en catastrophe, comme on parque les chevaux sauvages même s'il y en a toujours un ou deux qui s'échappent, au mieux d'orgasme seulement interne, tantrique, ce qui n'était jamais gagné d'avance, mais quelle fierté, quand j'y parvenais ne serait-ce qu'à moitié... La petite mort, en somme, me ramenait invariablement dans le monde des vivants, quand j'aurais préféré rester là-bas, au moins pour ne pas interrompre le plaisir... En même temps, je les trouvais un peu malsaines, nécrophiles quand même, ces filles, non?... Ou alors, comme Isis paluchant Osiris, elles tentaient de me faire revenir du royaume des morts?... Moi, je ne pourrais pas me taper une morte... Elles sont bizarres, quand même, ces filles...

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