dimanche 26 juin 2011










Tout passe tellement vite 3.

(Sauf les rages de dents. Mon dentiste m'avait prévenu que ça risquait d'enfler encore un peu.)

samedi 25 juin 2011













Tout passe tellement vite 2.

jeudi 23 juin 2011













Tout passe tellement vite.

lundi 20 juin 2011

Qui se souvient encore de Janet Gaynor et de Charles Farrell? Et de Frank Borzage? C'était du rêve. Pur. Du temps où le cinéma ne parlait pas. Ils ouvrent la bouche, on peut parfois lire un peu sur leurs lèvres, ça suffit bien. On ouvre bien grand les yeux. C'est même comme si on se réveillait, quand on regarde Lucky Star, comme si on se réveillait d'un très très long sommeil, lourd, sans rêves. On est ailleurs, enfin, pas juste un peu ailleurs, mais totalement ailleurs. Les bouches en disent bien plus et surtout bien mieux lorsqu'aucun son n'en sort. Alors, on ouvre les yeux, bien grand. Les oreilles, c'est fait pour entendre la musique, quand il y en a. Pour voir, il y a les yeux. On est là pour les voir, pour regarder, pour être dans ce rêve muet. (Si on veut les entendre parler, qu'on aille au théâtre.) A la fin, on n'est pas plus intelligent, ni plus malin, on a juste rêvé. Le propos est tellement simple. L'intrigue, il n'y en a pas vraiment. Il lui a lavé longuement et vigoureusement les cheveux avec des œufs. C'était drôlement beau, drôlement émouvant et sensuel. (Dans 7th Heaven, c'est elle, qui lui coupait les cheveux...) Des petites choses comme ça... Parce qu'il n'y a que les petites choses comme ça qui comptent vraiment... Ça vaut toutes les intrigues... Comme elle était gracieuse, Janet Gaynor... A la fin, il se traîne, avec ses béquilles, interminablement, dans une tempête de neige, pour la retrouver... Voilà, le rêve... On sait que ce n'est pas réaliste, qu'il ne peut pas retrouver l'usage de ses jambes si vite et dans de telles conditions... Un miracle?... On appelle ça comme on veut. Un rêve. C'est beau. C'est simple et lyrique. Ça fait pleurer. Ça suffit bien.

dimanche 19 juin 2011

Parfois, j'ai peur de sombrer dans la misère. Me retrouver à la rue. J'ai peut-être mangé mon pain blanc, comme on dit, je me dis alors. Ça me prend, comme ça, tous les cinq... dix ans. La dernière fois, je cherchais, difficilement, un nouvel appartement, une nouvelle tanière... (Je n'aurais peut-être pas dû lire la déchéance d'un homme, de Osamu Dazaï.) Jusqu'à quand dureront mes économies? Et après? J'ai eu de la chance, jusqu'à présent, j'ai toujours rebondi sans trop d'efforts. La question n'est pas tant : Que vais-je faire de ma vie? Mais plutôt : Vais-je continuer longtemps à me la couler douce ainsi? Je n'ai pas envie de souffrir. Je ne crois pas qu'on ait besoin de souffrir. Je veux bien jouer un peu le jeu, mais il ne faut pas que ça me coûte trop, puisque survivre a un coût. Heureusement, je suis d'une nature plutôt insouciante et en général je m'en fous, de l'avenir proche ou lointain. Mais, parfois, le spectre de la misère agite à l'horizon ses haillons nauséabonds et je fronce alors les sourcils. Que vais-je faire? Je me suis un peu embourgeoisé, ces dernières années, me suis habitué à un certain confort, tout en me la coulant très douce. Saurais-je encore réagir dans l'adversité? Ne me suis-je pas trop ramolli? Je n'ai pas envie de me battre pour survivre. Je n'en suis pas là, mais l'idée m'a travaillé toute la journée. Non, je ne me battrai pas. Je m'endormirai sur un banc, une nuit glaciale d'hiver, le froid m'emportera, ni vu, ni connu. Ni mendiant, ni voleur. Ou bien alors j'irai dans la forêt, dans une forêt, n'importe quelle forêt, je m'y construirai une cabane, vivrai en ermite, à l'affût du moindre bruit, vêtu de peaux de bêtes. Ou dans une grotte, même si mes os n'aiment pas l'humidité, je peindrai sur les parois. De toutes façons, je n'abandonnerai pas grand chose, je me dis, en regardant autour de moi... Mais dormir dans un bon lit, quand même, c'est agréable... Avoir des bières au frigo... Un ordinateur, une télécinémathèque, un canapé confortable, la radio, le gaz, l'eau courante et l'électricité, du thé blanc, des disques, des livres... Être en sécurité... C'est facile, d'être insouciant, quand on est vautré dans son canapé, le ventre plein, sirotant un whisky subtly sweet yet smoky en fumant une bonne cigarette... J'ai croisé mon SDF, en revenant de mon cinéma, vers les une heure du matin. J'étais à vélo. Il errait, cherchant un endroit pour dormir, dans ma rue, poussant son vélo sur lequel il a tout son barda. Tu rentres? il m'a demandé. Ben ouais, je rentre... Bonne nuit... A toi aussi...

mardi 14 juin 2011

En fait, tout ce qu'on veut voir, c'est son cul. On pourrait passer sa vie entière à le contempler et ce serait même alors une vie bien remplie, une belle vie. (Ça vaut aussi pour moi, je m'en rends compte, dans mes statistiques, on ne s'intéresse depuis un certain temps plus qu'à mon cul.) Il faut dire qu'elle avait un sacrément beau cul, Brigitte. Et mon cul, tu le trouves comment mon cul?... Bien... bien... Le mien, ce n'est qu'un cul... Enfin non, c'est le mien... Tiens, si je mettais mon cul, je me suis dit, un jour... Pourquoi pas?... Il est tout de même plus crédible, mon cul, plus réel que mon... âme... ou mon esprit, ou je ne sais pas quoi... Non?... Je l'ai un peu caché, au début, censuré, décensuré, recensuré, redécensuré, ça m'a posé bien des problèmes de conscience, moi tellement pudique en plus... Est-ce narcissique? Dans la mesure où je n'adore pas mon cul, certainement pas... Un attentat à la pudeur? J'aurais pu de la même façon montrer mes mains... Mais mon cul, quand même, j'avais un peu des réticences à le montrer au monde entier, au début, question de culture, je ne suis pas Yanomami à me balader si naturellement le cul à l'air... Et puis je me suis dit : Si Bardot montrait le sien, pourquoi ne montrerais-je pas le mien?... En plus, ce n'est pas vraiment mon cul, seulement une photo de mon cul, plutôt flatteuse en plus... Ceci n'est pas mon cul, aurais-je dû dire... De toutes façons, internet, c'est du cul, on y va surtout pour voir du cul, statistiquement, c'est un truc de voyeurs, pour se branler, pour plein de gens, d'une façon ou d'une autre, je ne juge pas d'ailleurs... Ce n'est pas mon simple, mon pauvre cul qui va changer quoi que ce soit à cette réalité, je me suis dit... D'ailleurs, moi aussi, il m'arrive d'y aller pour voir du cul. Si, par exemple, je tape dans google : "cul Bardot le mépris", je tombe sur mon propre cul. Me voici donc associé, aux yeux du monde, à Bardot, ou plutôt à son cul. Ce n'est pas rien. De toutes façons, on ne s'intéresse vraiment qu'à une chose, à son cul. Le reste, comme on dit, n'est que littérature.

mercredi 8 juin 2011

On y est presque. Le tsunami au Japon a un peu retardé l'échéance, rallongé le sursis. (Merci, Tsunami.) C'était prévu pour avril. Finalement, ce sera septembre. Les fournisseurs japonais pourront enfin honorer leurs commandes. Le tout numérique, on dit, dans le métier. C'est la mort du métier. C'est peut-être surtout la mort du cinématographe. Tout le monde se frotte les mains. Moi, je regarde, triste et amusé. J'étais un peu venu pour ça, dans ce métier de projectionniste, pour être là, pour assister de l'intérieur à la mort annoncée du cinématographe. Je ne parle pas des films, je parle de la technologie, du véhicule. Tout le monde se frotte les mains. Les exploitants n'auront plus d'ennuis avec les projectionnistes, puisqu'il n'y en aura plus. Les projections seront même toujours parfaites. Je connais un critique de cinéma, pourtant très cultivé et très fin, qui s'est même frotté les mains en public, sur son canard. Comme ça va être bien, enfin, parfait. Comme à la maison, j'allais ajouter... Bertrand Tavernier, pour le festival lumière, est venu l'an dernier présenter la 317ème section, un film qu'il adore. Tout le monde était bien content, copie numérique, nouveau master très haute définition, écran géant évidemment. J'ai appuyé sur le bouton de la souris, après son speech. J'ai regardé un peu, par le hublot, l'image. Parfaite. Puis je suis rentré chez moi. J'ai regardé, vautré dans mon canapé, la 317ème section, en dvd, sur ma télé full hd, c'était même drôlement bien. Quelques jours plus tard, on a passé psychose, de Hitchcock, en numérique. Les gens étaient ravis. Ils ne l'avaient jamais vu aussi beau, ce film, aussi parfait. Moi, je suis rentré chez moi, je me suis mis le dvd de psychose... Ce que je dis à ma directrice : comme c'est moche, votre numérique, ça me sèche les yeux... L'image est dure, froide, une image morte... Elle ne respire plus, l'image, on est devant les yeux écarquillés, on ne les cligne même plus... Pour moi, c'est du home cinéma géant, rien de plus... A la maison, c'est bien, en petit, car on n'est pas trop gêné par cette image qui ne respire pas, car c'est petit... En grand, ça vous submerge, instantanément, sorte de tsunami statique... Pourquoi alors abandonner une si belle technologie qui a tellement évolué en plus d'un siècle? L'argent. C'est une industrie, le cinéma. On a abandonné le 70 mm, alors que c'était ce qu'il y avait de mieux, technologiquement, comme véhicule, pour le très grand cinéma... Maintenant, c'est le 35 mm, qu'on fout à la poubelle... C'était mécanique, chimique, optique... Véhicule du rêve... On ne fera jamais mieux, même avec des milliards de pixels... On me dit que le spectateur ordinaire ne fait pas la différence. Je dis que si, il la fait, la différence, même si ce n'est peut-être pas conscient. Le cerveau, lui, fait la différence et même... toute la différence. Moi, je ne rêve plus, en numérique... Je suis quand même étonné de considérer que les professionnels du cinéma, les cinéastes, ceux qui sont censés avoir l'œil, comme on dit, ne réagissent pas, même si ce serait un peu tard, maintenant. Ils ne la voient pas, la différence, ils ne la sentent pas, eux? Mais peut-être que pour eux c'est mieux, aussi, le numérique. C'est le Progrès. Il n'y a donc rien à sauver. Alors, en silence, le cinématographe est mort.

mardi 7 juin 2011

Une mystérieuse inconnue venait me voir. Ma lectrice. Une seule lectrice, ça a toujours été mon idéal. Pas toutes. (Qu'en ferais-je?) Juste une. A une époque, je n'écrivais que pour une seule lectrice. Je la soignais. Je la gâtais bien. Même si elle s'en foutait peut-être bien. Même si elle n'était pas vraiment ma lectrice, peut-être, je me dis, car pour être lectrice faut-il déjà aimer lire et même savoir lire. Je lui avais consacré rien moins que toute ma vie. Mais elle s'en foutait, je crois. Elle ne lisait peut-être même pas. Elle ne s'intéressait qu'au poids, aux dimensions de la chose. Ça la flattait, qu'on puisse être aussi gros et tendu juste pour elle. Dans sa main, c'était bien lourd, bien chaud, bien palpitant, c'est tout. J'étais son (petit) cheval blanc... Quoi d'autre?... Et là, une éternité plus tard, dans ce désert cybernétique, une inconnue est tombée par hasard chez moi et est restée un moment, est même revenue souvent, quotidiennement. On s'est même mis au bout d'un certain temps à dialoguer, ailleurs, en privé. On se connait un peu, maintenant. Elle est allée se promener un peu partout, même les recoins elle les a visités. J'ai du mal alors à revenir chez moi, en public, tellement je la sens qui m'observe, qui me guette, ma lectrice qui est partout, même si elle est peut-être bien mon seul vrai public. Car elle, c'est vraiment une lectrice. Elle n'est plus tout à fait inconnue. Plus vraiment mystérieuse. J'ose à peine, depuis, poser un pied chez moi. Comme si elle s'était installée et qu'elle me regardait faire tout ce que je fais chez moi, même les petites choses très intimes. Je me sens observé. Comme ce n'est pas très grand chez moi, je n'ai pas vraiment d'endroits où me cacher de ses regards, pour être tranquille. Elle a exploré et connaît tous les recoins, même les cachés. Quand je vais aux toilettes, elle est là, assise, à côté. Il faut que je m'habitue. Ce n'est pas évident. Au début, je l'ai chassée, et même plusieurs fois. Mais je ne pourrais plus, maintenant qu'on se connait un peu. Et puis j'aime bien la savoir là, ma lectrice, pas n'importe qui, ma lectrice. Elle est douce, émotive, fine, bienveillante... Peut-être aurais-je préféré une chienne?... Je me dis qu'il serait peut-être temps de changer, ne plus écrire pour une seule lectrice qui serait même ma lectrice, mais pour plusieurs, deux pour commencer, puis peut-être trois... dix... Pas trop non plus... Ce n'est pas très grand chez moi... Je ne saurais plus où les caser...

dimanche 5 juin 2011

Tout ce qui me dérangeait dans le cinéma de Gaspar Noé, ce voyeurisme, cette sorte de complaisance dans le malsain, s'est évanoui en voyant ce film. Ou plutôt en le vivant. C'est psychédélique. Un trip. Si on considère que son monde underground et même hardcore est malsain, ce sera un mauvais trip. Il faut le vivre par delà le bien et le mal, comme son premier opus très réussi et très dérangeant : carne. Si l'on se place du côté de la morale, c'est fini, il n'y aura pas de voyage. On restera dehors. Enter the void, peut-être le plus grand et plus beau film de ces dix dernières années. Gaspar Noé a trouvé. On peut se demander ce qu'il pourra encore filmer après. On pense évidemment à 2001, de Kubrick. (Son film culte.) The tree of life, de Malick, est à ranger dans la même catégorie cosmique très rare. Chacun avec ses images, son monde, son style, dit finalement la même chose. Pas besoin d'être soi-même adepte des drogues dures et du sexe de back-rooms, pour entrer, comme on n'a pas besoin d'être chrétien à tendance mystique pour entrer chez Tarkovski. La forme est en parfaite adéquation avec le fond. Car c'est la même chose, la forme, le fond. Un grand film psychédélique rythmé par des battements de cœurs technoïdes. Si on ne sait pas entrer, c'est la nausée. Si on commence à réfléchir à la situation, à se regarder dans le miroir, on prend mal au cœur et on tournera bientôt de l'œil. Il faut le prendre pour ce qu'il est, ce film, une expérience. S'y abandonner. Soit on l'accepte, soit on le rejette. On vous offre du LSD, en somme. On flotte. Et en même temps tout va tellement vite. C'est d'une grande beauté, en tout cas. Ça renvoie à l'enfance, qu'on a vécue, qui est toujours dans notre cœur.