Une corneille s'est posée sur une antenne télé et je me suis souvenu du Grand Corbeau dans mon rêve de la nuit. Comme un passage s'est formé entre la corneille sur l'antenne télé et le Grand Corbeau de mon rêve. J'ai froncé les sourcils. Un grand corbeau, vraiment très grand, plus grand que n'importe quel corbeau, il devait faire sur pattes trois mètres de haut, perché sur une grosse branche me regardait, un corbeau mythologique, de je ne sais quelle mythologie. Si la corneille ne s'était pas posée sur l'antenne télé, tache noire mouvante dans le coin de mon œil, bruit d'ailes qui battent sur place avant de se replier, je ne me serais pas souvenu du grand corbeau de mon rêve. J'ai froncé alors les sourcils. La gravité m'a gagné. Un instant j'ai perçu le passage menant de la corneille au grand corbeau de mon rêve, ou plutôt l'absence de passage car tout se joue dans l'intervalle, dans la simultanéité. (Comment pourrait-il y avoir un temps, s'il n'y a pas d'espace?) Je l'avais oublié, le Grand Corbeau. La corneille me l'a ramené. Il me regardait. J'étais saisi. Il ne disait rien. Il n'avait rien besoin de dire. C'était évident, ce que ça disait, un si grand corbeau noir. Son œil luisait comme une flaque de pétrole. Je me voyais dedans, déformé, je savais le moment proche où je ne serais plus qu'un reflet déformé dans son œil, ça ou autre chose, tellement déformé que ça pourrait être n'importe qui, n'importe quoi. J'ai fini par me désintéresser du grand corbeau, il me semble, même si je n'en suis pas si sûr, j'aimerais le croire peut-être seulement. Puis j'ai oublié. Puis une corneille, à l'aube, s'est posée sur une antenne télé et le Grand Corbeau m'est revenu. Il n'avait pas disparu. Il était toujours là, sur sa branche, à me regarder. J'ai froncé les sourcils. Puis, comme je suis fataliste, j'ai souri : la gravité s'est envolée, le poids, j'ai même salué de loin en pensée le Grand Corbeau à travers la corneille qui m'attendait sur sa branche.
samedi 23 mars 2013
vendredi 22 mars 2013
Cette image, ou alors une autre, je me suis dit, mais prenons celle-là, plutôt qu'une autre, celle qui vient, qu'on a tout de suite sous la main, de toute façon j'en dirai toujours la même chose, ça m'emmènera toujours au même endroit, alors à quoi bon s'user les yeux à trouver la bonne image, puisqu'il n'y a pas en soi de bonne image, que n'importe quelle image, y compris un carré noir, ou blanc, aurait le même effet, celui de déclencher la parole, si parole il y a, au moins le son, la voix, si voix il y a, mais le son au moins, qu'il y ait un son qui sorte, que ça emmène là ou ailleurs ou nulle part quelle importance au fond, même si d'ailleurs l'image se suffit à elle-même et qu'on pourrait alors s'en contenter, de l'image même muette. L'instant est passé, ce que ça me dit. C'est figé, là, étrangement. Toutes ces histoires, derrière les fenêtres, toutes ces vies qui sont déjà passées, perdues, englouties. Ça n'existe déjà plus. C'était ce matin, il y a une éternité. Je me suis arrêté, je me suis accroupi, dans le caniveau, ai regardé longtemps en bas, pour voir ce qu'il y avait en haut. Ça m'a rappelé un film de Sokourov que j'avais vu hier soir, il y a une éternité : Élégie de la traversée. Une voix, sur des images, monotone et intense. Elle aurait pu me raconter n'importe quoi, je l'aurais suivie, cette voix, même me raconter rien du tout je l'aurais suivie, c'était comme l'eau qui court dans le caniveau avec dessus les reflets à la fois figés et fuyants de la vie, du temps. Tout est englouti, déjà. On ne peut pas reproduire ça. On ne peut pas l'emprisonner dans un cadre. Même si on le fait. C'est alors juste un constat d'impuissance. Un instantané. C'est l'appareil, qui le prend. Moi, je ne prends rien, je ne sais rien prendre. Je ne vois rien, d'ailleurs, quand l'appareil le prend. C'est l'appareil, qui voit. Alors, je regarde, après, ce qu'il a pris, l'appareil. C'est à peine si j'admets que mon doigt a appuyé sur le déclencheur à un moment donné. J'envisage pour très bientôt de déclencher les yeux fermés, pour voir, ou plutôt pour ne plus voir et donc pour enfin voir, comme s'il y avait un secret, là-dedans, un mystère, qui se déroberait à l'instant même où on voudrait l'apercevoir et le cadrer, le figer. Il faudrait donc arrêter de vouloir saisir ce qui ne se saisit pas, arrêter de porter un regard, quel qu'il soit, sur quoi que ce soit. Peut-être qu'alors, une fois, un instant, ou entre deux instants, on verrait.
vendredi 1 mars 2013
De Nancy, de Paris, de Toulouse, de Chatou, de Metz, de Villeurbanne, d'Annecy, de Lyon, de Montpellier, de Nantes, de Grenoble, de Bordeaux, de Rennes, de Dijon, de Marseille, de Nulle Part, de Freyming, de Clermont-ferrand, de Lille, de Caen, d'Aix-en-Provence, de Rouen, de Khalmthout, de La Chaux-de-Fonds, de Lausanne, de Monchengladbach, de Setif, de Schweighouse-sur-Moder, de Selestat, de Strasbourg, de Bayonne, de La Réunion, de Pau, de Brest, de Chartres, de St Aignan, de Tours, de Besançon, de Clichy, de Créteil, de Gaillon, de La Courneuve, de Melun, de Palaiseau, de Pantin, de Plaisir, de Provins, de Rueil-Malmaison, de Seris, de Sainte-Geneviève-des-bois, de Versailles, de Nîmes, de Calais, de Douai, de Seclin, de Valenciennes, de Cholet, d'Albert, de Compiègne, de Saintes, d'Avignon, de Digne, de Grasse, d'Hyère, de La-Seine-sur-Mer, de Villeneuve-Loubet, d'Archamps, de Bron, de Limonest, de Saint-Etienne, de London, du Luxembourg, de Moscou, de Malmø, de Tunis, de Kiev, de Los Angeles, de Taylor (Michigan), est-on venu en février me voir. Jean-Charles Freycon, not set, Stan Getz, croix de malte cinéma, saucisson, fille qui court, Jean Valjean, Mariko Okada, acteur baraqué, anomalies l'île de Moucha, banc misère, bateau sculpté en bois d'olivier, duel au soleil, encule-moi gentiment, enfance de Vincent Van Gogh, femme où on voit les seins, femme qui court, fleur du saucisson sec, fumée bouche, Harry Baur, help je me noie!, homme qui rit, invention militaire, Jacques Chenal kung fu, James Blake (conducteur de bus), jeune fille qui court, Madame Muir et le fantôme, malade fumeur, mariage Marina et Carlo 21 janvier 2012, Maureen O Sullivan, Michel Simon, Michel Simon et les misérables, Mouchette, Mouchette à guillotine, Mouchette and Co, Nancy Brown peace carillon tower, objet déco militaire, Ovidie nue, petits seins aux gros tétons matures, pieds de la misère, plafond bois, rond de fumée, seins noirs, s'en aller, si tu aimes quelque chose laisse-la partir si elle
revient elle est à toi si elle ne revient pas elle n’aura jamais eu
lieu d’être, sodomie trop profonde, sœurs du couvent Sainte-Rita, Tippi Hedren les oiseaux, vieil avion plage, Zoku Sugata Sanshiro, s'est-on interrogé en gros.